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Journal d'une famille à moutards

Ici, il y a des anecdotes, du rire, des pleurs aussi et beaucoup de vie. Des instants volés sur du papier volant, appelés à durer.

Au s'cours, il lit

Ça a commencé il y a deux ans, en début de moyenne section !

D'abord des syllabes simples à deux lettres : NA, TU, RI, MO, ... puis à plus de 2 lettres : BAR [le choix de l'exemple est complètement fortuit hein !], BOL, ... pour les sons à la prononciation phonétique ne comportant pas de pièges à la française ! Sont venus rapidement ensuite des sons plus complexes : ON, AN, OI, AI, ... Le plus dur étant l'intégration des exceptions françaises : le C qui se prononce KA devant le A et SI devant le I ; le G qui se prononce JI devant le I et GUA devant le A ou encore le E qui se prononce alternativement EU ou AI en fonction du mot ...

Si l'apprentissage fut linéaire et syllabique au départ, il entama rapidement une courbe exponentielle mêlant approche syllabique et globale. C'est là où on je ne comprends pas tout le pataquès fait autour des méthodes de lecture et le partisanisme entre les deux méthodes ; car après observation de TonMoutard [mais pas que !], il y a un démarrage avec un passage syllabique obligatoire qui favorise l'analyse et l'appropriation du mécanisme, et lorsque un premier ancrage est acquis, l'enfant utilise naturellement les deux méthodes en parallèle puisqu'il imprime photographiquement certains mots et peut commencer à comprendre un texte et induire les mots dont il ne maîtrise pas la lecture, ce qui vient renforcer les premiers acquis et de nouveaux automatismes, etc. C'est ce qu'on peut appeler véritablement l'entrée en lecture car ce n'est plus du déchiffrage, mais celui-ci est essentiel pour démarrer sur les bonnes bases !

 

By Nathalie Jomard dans son blog "Petit précis de grumeautique" : http://grumeautique.blogspot.com/2013/09/latrines-methode-de-lecture.html?_sm_au_=iVVV2ZD5q3PRNv5P

By Nathalie Jomard dans son blog "Petit précis de grumeautique" : http://grumeautique.blogspot.com/2013/09/latrines-methode-de-lecture.html?_sm_au_=iVVV2ZD5q3PRNv5P

Les sons un peu plus alambiqués du type : QUI, OUILLE, EUIL, ... sont arrivés en cours de grande section et à présent, TonMoutard arrive non seulement à lire tout type de texte [ses livres, contes et encyclopédies pour enfant, BD, affiches, ... ] avec une grande facilité, mais il mémorise l'orthographe des mots, comprends les notions élémentaires de grammaire : ajout du E pour le féminin et le S pour le pluriel et le S ou le X pour le masculin ; déduire l'orthographe d'un mot à partir de ses déclinaisons de genres, par ex ajouter un D à la fin du mot FROID parce qu'on entend le D au féminin ; ou encore nuancer les différentes façons d'écrire les sons : O, AU et EAU ; AI et EI, ...

Cette phase est à la fois magique et mystérieuse ! Cette période sensible est visible dans la manière dont chaque occasion est un prétexte pour TonMoutard pour intégrer un nouveau mot, une nouvelle règle, et la mettre en pratique, ... Il passe son temps à nous parler en mots épelés, à nous poser des défis dictée et à refaire vérifier la bonne orthographe des mots qu'il connait ou de ceux nouveaux auxquels il s’intéresse.

Il a encore tellement à apprendre mais l'entrée en lecture marque pour lui un grand pas, celui où il met un pied taille 33 dans le monde des adultes [oui c'était déjà bébé bigfoot à la naissance !], avec ses codes et sa logique propres. Celle où l'environnement qui l'entoure prend une nouvelle dimension [et celle où tu ne peux plus prononcer des mots tabou du genre "passe-moi le C.H.O.C.O.L.A.T" sans te faire reprendre par lui]. Celle ou une complicité d'un autre genre se crée entre parent et enfant avec des marqueurs culturels forts !

Outre le fait de lire, cette phase renforce également la structuration de la pensée et la production d'écrits. La rate-de-bibliothèque que fut TaServiteuse [oui elle "fut" car malheureusement elle ne lit plus du tout autant, snif !] est toute enthousiaste pour l'entrée en CP [celle de TonMoutard pas la mienne hein !] pour le voir s'épanouir encore plus, et s'il pouvait hériter du gène de la bibliophilie de sa môman ...

Orthographe presque impeccable, respect des règles grammaticales, pensée structurée, tout y est non ?!

Orthographe presque impeccable, respect des règles grammaticales, pensée structurée, tout y est non ?!

Et puis il y a l'appropriation des outils de son temps :

"Maman, je peux utiliser l'ordinateur pour écrire des mots STP ?" ...

... oui bien sûr mon chéri, il faudra juste ensuite penser à me rappeler de prendre RDV avec le psy, pour comprendre ce que j'ai bien pu louper hein ! 

Bon, je vous rassure ; TonMoutard est un garçon bien élevé d'habitude, mais le propre de l'entrée dans le monde des grands n'est-il pas de jouer avec leurs propres codes, signant une sorte d'accès à la sphère des dieux ?!

Quand je vous disais que j'avais hâte ... faudrait plutôt ralentir un peu parfois car comme le disent si bien les vieux sages de la pédagogie infantile : ça va tellement vite !

La rédaction de ce billet m'a été inspirée par Gwen, dans son article [très complet]:

petitbout-petitbout.blogspot.com/2019/07/7-supports-solides-et-efficaces-pour-apprendre-à-lire

Vous trouverez dans celui-ci une mine d'informations et références de matériel Montessori à utiliser, surtout si vous pratiquez l'IEF ou vous impliquez davantage dans l'accompagnement de l'apprentissage de la lecture par vos enfants [ou si vous vous intéressez tout simplement à la pédagogie : enseignants et autres pédagogues !]. Côté Boitamoutards, l'accompagnement se fait moins par l'utilisation de matériel spécifique qu'une écoute au quotidien : répondre aux questions et remarques, lire des livres ensemble, au format libre ou orienté pour jeunes lecteurs [à cet effet, les séries "Sam et Julie" sont tout à fait appropriées] , utiliser des jeux de société orientés ou détourner des jeux ordinaires [tu connais ma fameuse soupe au MOGO ? http://laboitamoutards.com/2018/12/soupe-au-mogo-et-mikala.html]. 

J'avoue surtout que je n'ai aucune patience ni esprit pédagogue pour mener des ateliers structurés employant des outils plus ou moins "sophistiqués" ; par contre j'aime les choses ludiques et j'aime beaucoup lire, et pour ça, TonMoutard m'aide pas mal en étant réceptif au jeu et nous arrivons à passer de chouettes moments à deux ! 

Si ce passage se fait souvent tout naturellement en CP [voir de plus en plus avant en cours de GS, ce que je remarque dans l'école de mon fils ou chez les enfants d’amis par exemple], ceci pour la plupart des enfants ne présentant pas de difficultés particulières ; il n’en soulève pas moins de grandes interrogations ! 

Notre société au besoin de technicité croissant ne met-elle pas la barre trop haute pour nos enfants ? Les laissent-elle suivre leur rythme et n’accélère-t-elle pas un apprentissage par crainte de l’échec scolaire au détriment d’autres apprentissages plus « vitaux » pour l’enfant [le jeu libre et naturel par exemple ou bien même l’ennui ?] ? 

Ou bien sont-ce tout simplement les enfants de cette génération qui sont plus réceptifs à une stimulation qui ne serait pas forcément plus excessive : les parents étant seulement plus disponibles pour leurs enfants, l’école ayant adapté ses formats pédagogiques aux nouvelles connaissances sur le développement de l’enfant et ayant intégré les nouveaux besoins de la société ?  

Autrement dit, l’enfant qui lit entre-t-il dans la sphère des dieux ou bien renonce-t-il à une forme d’innocence ? 

Les avis continueront à diverger, mais mon avis est qu’un enfant qu’on laisse explorer dans un environnement approprié et pouvant répondre à sa curiosité naturelle et à qui on reste disponible sera naturellement attiré par et aura de grandes chances de trouver seul la voie vers le « monde des adultes », qui est intimement lié au sien ; celui de l’enfant étant aussi bien emprunt de récits et d’imaginaire, les mots écrits n’en sont que la transcription codée d’un concept universel aux cultures, aux sexes et aux âges.

L’enfant ne vit pas dans un monde isolé et parallèle où il se plairait a se réfugier dans l’imaginaire, il cherche en permanence à faire « comme les grands » et revendique sa place dans le monde réel, et s’il en propose parfois des versions improbables et farfelues  c’est pour mieux les tester, comprendre et apprivoiser son monde, notre monde et finalement, l’entrée en lecture ne fait que lui donner cette clé supplémentaire ! Le tout étant de lui reconnaître ce droit en respectant son rythme.

Par ailleurs, dans un monde où la connaissance est aussi abondante que la désinformation, ce n’est pas tant apprendre à lire qui est un enjeu que comprendre un texte, en questionner le propos et les références et le croiser si besoin avec d’autres textes permettant de l’enrichir. L’esprit critique [oui c’est mon dada, vous l’aurez peut-être compris à force. Biais professionnel oblige !] est devenu crucial dans nos vies et nos façons de forger nos opinions en sont bousculées ; alors si une entrée en lecture réussie [et ce sera le cas pour la majorité des enfants] est fondamentale ; proposer des lectures variées, contemporaines et anciennes, à la structure narrative ou documentaire, ambitieuses et sans tabous ou censures sous couvert d’agîsme se révèle vital pour de futurs adultes conscients et confiants ! Et si l’entreprise et la mécanique d’apprentissage peuvent être laissées en grande partie à l’école, nous parents sommes plus que des relais, avons un rôle déterminant et ne devons pas hésiter à prendre toute notre place dans la seconde partie.

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